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Mer 13 Mar 2013 - 11:58 |
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Dinjelaï poussa la porte avec un sourire: l'odeur du vieux papier s'insinua comme lorsqu'on ouvre un manuscrit couvert de poussière. Elle pénétra dans une salle de classe, qui n'avait visiblement pas servi depuis longtemps. Les petits bureaux d'écoliers, gravés au canif, étaient repoussés contre les murs, les chaises empilées les unes sur les autres pour faciliter le ménage qui devait se faire, une fois par an au mieux. Elle avança jusqu'au centre de la salle puis fit un tour sur elle-même. Comme dans les salles du rez-de-chaussé, où elle avait souvent passé quelques heures pour les concours organisés par les Magisters, une estrade de bois se trouvait sur le mur à droite de l'entrée. Derrière, un grand tableau noir et quelques craies abandonnées. Avec nostalgie, l'elfe repensa aux classes du Màr Menel après les longues vacances d'été. Le premier jour, les enfants étaient invités à remettre la salle en ordre. Et tout était exactement comme dans cette pièce aujourd'hui.
Mais ce n'était pas exactement la rentrée, l'elfe avait passé l'âge, et surtout la taille, de caler ses genoux sous les tous petits bureaux. Elle avait rendez-vous avec Zackheim de Galastden, le Seigneur du Màr Menel. Comme souvent, elle avait donné un horaire, et s'était appliquée à arriver une bonne heure à l'avance. D'abord parce qu'elle voulait discuter un peu avec son amie Myredith, Magister de magie et de botanique, et aussi parce que la réputation de droiture du Seigneur Céleste lui faisait pressentir qu'il serait parfaitement ponctuel, et elle voulait que tout soit en place pour son arrivée.
C'est pourquoi, malgré l'heure du rendez-vous, fixée à midi, elle s'était réveillée au Màr Luimë aux aurores. Elle avait avalé un petit déjeuner tout en relisant les derniers rapports du Maître des Rumeurs au sujet du Rocher Flottant. Vers dix heures, elle s'était préparée. L'entrevue devait rester discrète, mais l'elfe devait rester coquette et cela ne lui semblait pas incompatible. Elle avait enfilé une tunique bleue fonctionnelle, à peine brodée, sur un pantalon de vol brun.
* En piste ! * ** En ciel tu veux dire ! **
Loméanor était tout proche, le couple avait préféré s'y rendre pas la voie des airs, boudant l'Interstice. Un jour comme aujourd'hui le printemps semblait vouloir s'avancer. Anareinth avait profité de la route pour chatouiller sa Liée:
** Tu as l'air stressée Din... ** * Et tu trouves cela superflu? J'ai rendez-vous avec un psychorigide couronné, un intransigeant de la morale, il a réintroduit la loi martiale au Màr Menel Anareinth, c'est pas rien ! * ** Oui, ça c'est la facette publique du personnage, ne juge pas trop vite le revers de la médaille, c'est sans doute un homme charmant dans le privé... **
L'elfe s'était alors mordillé la lèvre, puis avait hoché la tête comme pour mieux se convaincre des propos du dragon Blanc.
Après un bref échange avec Myredith, qui partait avec un groupe d'élèves d'une douzaine d'années en exploration pour constituer un herbier des plantes qui colonisaient les chemins des alentours, Dinjelaï était donc montée à l'étage où elle avait demandé qu'on lui réserve une salle. Etant une figure connue de l'Académie, figure doublée d'un statut auquel on peut difficilement refuser quelque chose, ce n'avait pas posé de problème, on ne lui avait même pas demandé pourquoi.
L'elfe sortit de ses rêveries, tournant toujours lentement au centre de la pièce. Elle imaginait quelque chose de plus... de moins... rustique, pour une première entrevue. Cela dit, cela correspondait parfaitement à l'impératif de discrétion. Din tira le bureau du professeur du mur, et ramena la chaise assortie à côté. Une petite moue étira son visage. Toutes les autres chaises étaient minuscules, hors de question d'offrir un tabouret d'élève à Zackheim. Hors de question également qu'elle le regarde par dessous les trous de nez. Elle découvrit un placard à balai dans lequel était entassé, avec tout un tas de bazar, un siège adulte parfaitement bancal. L'elfe fronça les sourcils, soupira, et tira l'assise hors de son placard. Les minutes suivantes furent consacrées à rendre les quatre pieds un peu plus égaux à l'aide d'une feuille de papier pliée... De plus en plus pliée...
La Dame du Màr Luimë en était là dans ses efforts lorsqu'après avoir brièvement toqué contre la porte, le battant s'ouvrit sur la silhouette droite du Seigneur Céleste. Elle se releva d'un bond, passa machinalement la main dans sa chevelure ébouriffée, puis d'un grand sourire vint saluer le Seigneur, main tendue vers lui.
Ouf, bienvenue Seigneur ! Comme vous le voyez, j'étais en train de me battre contre cette chaise récalcitrante!
Après avoir échangé une poignée de main, elle étendit le bras, désignant le théâtre poussiéreux de leur premier tête à tête:
L'écrin de cette rencontre n'est pas tout à fait luxueux, mais je suis certaine que nos échanges seront bien plus brillants que les carreaux de cette salle de classe !
Un coup d'oeil sur les vitres en question, elles étaient sales et partiellement couvertes de toiles d'araignée... |
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Ven 22 Mar 2013 - 16:22 |
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La vie de Seigneur n'est pas un long fleuve tranquille
Zackheim se fit déposer non par Sarevok mais par le dragon du chevalier Jornwill, Melmoth. L’énorme brun était aussi paisible que son lié était une tête brûlée, indiscipliné, frondeur, toujours à contourner la loi, utile néanmoins par sa connaissance du Rhaëg, ses talents incontestables de guerrier et, malgré ses moeurs dépravées, et d'une loyauté absolue au kaerl. Zackheim avait réussi à le coincer au Màr Menel justement en lui donnant mission d’accélérer la préparation militaire des Aspirants, les Maîtres étant débordés par les nouvelles exigences du Seigneur. Soucieux de ne pas faire remarquer qu’il s’absentait du kaerl, Zackheim avait donc demandé à Sarevok de se montrer un peu au Valarëa afin de faire croire que son lié était toujours cloîtré dans ses appartements, à oeuvrer pour le bien des Célestes. On avait annoncé officiellement qu’une importante réforme allait être promulguée, renforçant la sécurité intra muros du Màr Menel, car se faisaient de plus en plus insistants les bruits de dangers menaçant la cité aérienne. Les mesures de bouclage "Niveau Trois"étaient entrées en vigueur et les Marqués assignés à résidence dans leurs appartements. On en avait recensé une dizaine mais il se pouvait qu’ils soient plus nombreux. Il faudrait peut-être instaurer une visite hebdomadaire approfondie pour déceler le fléau chez ceux qui dissimulaient l’inquiétante Marque noire. Le passage de l’Interstice était interdit sauf motif grave, les envols de dragons pour des raisons personnelles plus surveillés que jamais. Le ravitaillement de l’île aérienne n’était plus effectué que par des Liés, aucun marchand n’étant admis à profiter des dragons pour introduire ses produits dans la cité. Le Gardien cherchait à remettre en état le portail de transport communiquant avec l’Académie et qui s’était déréglé depuis des lustres sans que personne y trouve à redire vu le caractère très pénible du passage et le résultat hasardeux quant au point de réception. En effet, si la perte d’altitude de l’île aérienne semblait avoir été enrayée , Maeglin del Cirth était épuisé et il lui faudrait des semaines de repos pour retrouver ses forces. Si le phénomène, dont l’origine maléfique ne pouvait faire aucun doute, se reproduisait dans l’intervalle, magie contre magie,et que la chute s'accélérait le portail serait indispensable pour une évacuation générale. Toutes ces réflexions s’entrecroisaient dans l’esprit agité de Zackheim alors que, discrètement, sortant d’une porte cochère communiquant par un passage souterrain avec les Spires et l’appartement seigneurial, il se dirigeait vers son but. Enveloppé d’un manteau gris foncé sur un costume de cuir souple, le visage abrité par les bords rabattus d’un large chapeau, il portait un arc de chasseur, une dague, un carquois et une gibecière, ce qui changeait totalement son allure. Il montra au garde d’entrée un laisser-passer signé du Seigneur, l’autorisant à chasser le daim et à utiliser un dragon pour rabattre et rapporter ses prises. Melmoth l’accueillit sans même un grognement mais sans que la couleur de ses yeux changeât, ce qui montrait au moins qu’il n'éprouvait pas d’hostilité à son égard. Zackheim savait que le dragon était de grand savoir, recherchant la science dans les livres autant que dans la mémoire collective des fils de Flarmya. Tous deux avaient autrefois échangé quelques propos érudits quand ils se croisaient aux Archives, Melmoth sous sa forme humaine, en ample robe de moine magister, Zackheim dans le vêtement noir et austère qu’il affectionnait à l’époque.Ce temps de tourmentes intérieures n’était pas si loin mais à vingt-cinq ans, Zackheim sentait qu’il avait vécu plus de drames, préparé et exécuté plus de projets inouïs que bien des vénérables Conseillers du Màr Menel, lesquels se prenaient cependant pour des parangons d'expérience parce qu’ils avaient le triple de son âge. Mais il ne tirait guère de satisfaction de sa réussite. Il avait cru, une fois sa vengeance accomplie et le pouvoir en sa possession, qu’il connaîtrait l’apaisement. Mais non seulement l’exercice du pouvoir se révélait n’être qu’une suite de compromis et de demi-mesures, un continuel ménagement de la chèvre et du chou, l’éclat de sa victoire s’éteignait dans l’ombre de Drazahir étendant ses ailes noires sur les kaerls. Il n’avait même plus le réconfort des nuits secrètes avec Persée, sa tendre et belle amie. Après l’éclat de Peddyr Thelrand, on avait bien eu du mal à dissimuler la présence de la Capitaine des Armées dans l’appartement du Seigneur. Avec les menaces grandissantes, il était devenu encore plus impératif de ne rien révéler de leur liaison, fait qui pourrait permettre de remonter jusqu’à l’arrestation de l’ancienne Dame. Les amants ne se voyaient plus que pour de brefs moments d’étreintes fiévreuses, tout à la fois heureux de se retrouver enfin, mais déjà malheureux à l’idée de devoir se séparer si vite. Ce fut donc un Zackheim particulièrement sombre qui entra dans les vénérables bâtiments de l’Académie. La pensée de Nalesean, le Maître des Soins, le préoccupait. Sa fidélité à Heryn effaçait-elle le devoir d’aide qu’il se devait d’apporter aux Célestes par sa présence rassurante et ses talents de guérisseur ? Certes, il avait exprimé son opinion sur la nature des Marques, mais il n’avait pas encore sollicité une entrevue auprès du Seigneur. Fallait-il le convoquer officiellement ? Des doutes, partout des doutes, des choix à faire. Dire qu'il avait cru au pouvoir juste, s'exerçant dans la sérénité des certitudes.
Une dame et un chasseur
La fin du dernier concours rassemblait les autorités et le hall était désert. Dinjelaï avait bien choisi la date. La salle de réunion lui fut indiquée par le concierge, qui se permit un petit sourire en coin , en susurrant d’un ton chargé de sous-entendus :
– Ah, vous êtes Chasseur... laissez vos armes ici. Les visiteurs ne doivent pas être armés dans l’enceinte académique. La dame en question vous attend dans la salleB2, un endroit très discret, très tranquille, vous ne serez pas dérangés. On n’a même pas fait le ménage pour ne pas provoquer de questions. Vous voulez que je fasse envoyer des rafraîchissements, des fauteuils ? Un canapé, peut-être ?
Zackheim ne remercia pas, ignora la proposition et se dit que décidément, l’esprit d’insolence et le manque de tenue se développaient par trop dans tous les milieux, y compris chez les concierges. Il déposa son arc son carquois et son sac, mais garda la dague, dissimulée sous le manteau. Ce stupide gardien n’allait certainement pas prolonger longtemps sa carrière de cerbère de l’Université. Même si le Màr Menel n’avait pas la juridiction du lieu, il allait avertir Myredith Viel de mieux choisir son personnel et de veiller à la réputation de l’ institution dont elle assumait la charge. Mais il devait admettre que la Dame neutre avait été audacieuse de se présenter comme une femme cherchant un endroit tranquille pour un rendez-vous.. c'était scabreux, mais quand même bien manœuvré pour dissimuler la nature de cette réunion et l’identité des participants.Elle n'avait seulement pas pensé qu'il choisirait de se costumer en simple coureur des bois. Il frappa un coup sec sur la porte marquée B2 et poussa le battant, s’arrêtant, .surpris malgré tout par la vétusté de la salle, visiblement désaffectée. C’était inadmissible. Il haïssait le désordre et la poussière, signes de renoncement à régenter tout ce qui pouvait, devait, l’être. Encore un signe de l’inadmissible décadence de la civilisation. Les araignées qui prennent le pouvoir dans un placard abandonné , sont les symboles velus et dégoûtants de l’effondrement des Principes, de la disparition des Valeurs et de la négation de toute Autorité. Il s'était demandé sous quelle apparence s’était présentée Dame Dinjelaï. A sa grande surprise, elle n’avait en rien dissimulé son identité. Il fut stupéfait en pensant aux conclusions que le ricanant concierge avait dû en tirer. Héhé, Dinjelaï Al’Ysiria s’offre des Chasseurs à l’Académie. Des chasseur bons tireurs sans aucun doute! ils discutent sans doute cuissots de biche et recettes pour accommoder les cailles à la sauce poulette. Zackheim se sentit blêmir (il ne rougissait jamais) à l’idée de toutes les plaisanteries vulgaires qu’on pouvait faire autour du personnage qu’il s’était choisi. Il faudrait faire taire ce concierge et il n'aurait qu'à lui montrer son visage en sortant pour que le goujat se sente très mal.
Entrevue
Pénétrant de trois pas dans la pièce, ravalant sa rage, il s’inclina à sa manière qui mêlait toujours un peu de hauteur à une politesse élégante et raffinée. Il nota l'accueil simple et direct de Dinjelaï Al’Ysiria et il allait s’incliner de nouveau pour un baise-main protocolaire, quand il fut surpris par la poignée de main cordiale, comme entre amis de régiment, que son geste déclencha. Cependant, le sourire était gracieux et après tout, l’économie des courtoisies d’usage était un gain de temps et on était entre dirigeants, non à une réunion mondaine. Décidément, les façons franches de la dame lui plaisaient. La vieille chaise bancale le fit hésiter. Etait-ce une manoeuvre hypocrite pour le faire tomber une fois assis ou pour le distraire en provoquant un petit taptop énervant à chaque fois qu'il bougerait un peu ? Il remercia donc pour le siège proposé mais le mit de côté.
–Humm, je crains que cette chaise n’ait fait son temps et je préfère la sécurité. Je vais prendre une de ces tables comme banc.
Il attendit que la Dame se soit assise, posa son manteau sur le bureau d’écolier et s’installa , une jambe un peu pliée, l’autre négligemment allongée, les mains croisées devant lui pour montrer combien il était à l’aise et bien disposé à l’égard de son interlocutrice. Il se décida à aborder le premier le sujet de leur réunion :
–Ce n’est certes pas le lieu qui compte mais ce qui s’y décidera. Je suis persuadé que vous n’êtes pas pour faire durer les préambules. J’ai souvent envié l’efficacité de votre Kaerl et regretté la tendance du mien à vouloir orner ses discours des fleurs de la rhétorique et à confondre salutations distinguées avec prises de décisions.
Hum, mauvais début pour quelqu’un condamnant le langage fleuri. Il poursuivit :
– Nous devons unir nos forces et votre invitation montre que vous pensez de même. Il nous reste à établir le modus vivendi qui règlera cette alliance en la faisant passer de l’intention à la réalisation pratique. Nous luttons contre le même ennemi, opposons- lui un front commun. Je vois trois domaines où nous pouvons lutter de concert : En premier l’aide apportée à la défense d’un kaerl en cas d’attaque isolée. Puis, l’échange des informations , ce qui suppose l’accès facilité à des messagers dûment crédités. Enfin, une stratégie commune en vue non seulement de contrer Drazahir mais de le détruire .
Il marqua une pose en guise de transition et reprit sur un ton plus sec :
–Je souhaiterais aussi savoir quelle place vous pensez réserver aux Ardents dans l’avenir . Pour moi, et pour l’instant, elle ne peut-être que très limitée et prudente. Je n’ai aucune confiance en la parole d’Alauwyr Iskuvar pas plus qu’en la sagesse de ses réactions. Je crois que vous êtes arrivée à vous entendre avec lui et je voudrais savoir dans quelle mesure, afin de ne pas me placer en position de compromis obligé, dépassant ce que les Célestes peuvent tolérer venant d’esprits se délectant du crime et de la trahison comme moyens de réaliser leurs ambitions sordides.
Il se tut et fixa son célèbre regard vert abyssal sur les yeux clairs de Dame Dinjelaï Al’Ysiria. |
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Posté le:
Mer 27 Mar 2013 - 12:37 |
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Dinjelaï avait hoché la tête, et même sourit, avant de considérer la malheureuse chaise bancale:
Oui, malgré mes efforts je crains qu'il ne soit pas entièrement sûr de poser son séant dessus...
Elle suivi du regard le Seigneur, qui portait une tenue de camouflage adapté à la chasse, en se demandant s'il avait couru le gibier avant l'entrevue ou bien s'il comptait s'y rendre après. Elle jeta un oeil vers les carreaux poussiéreux. Devait-elle comprendre que le Seigneur Céleste avait autre chose à faire après et qu'il ne souhaitait pas s'attarder à l'Académie en sa compagnie? L'elfe en fut légèrement déstabilisée, elle haussa légèrement les sourcils. Zackheim s'était assis nonchalamment sur un bureau, tandis qu'elle avait pris place sur la chaise valide. Ainsi, quoiqu'éloignés, il la dominait légèrement de la taille. Au plus grand étonnement de Dinjelaï, le Céleste commença la séance de but en blanc. Les mouvements de ses mains étaient francs, appuyant ça et là les "nous devons", les "nous pouvons lutter" et autres "stratégies communes"... Cette manière acheva de perturber Din, elle serra légèrement les dents pour s'empêcher de couper la parole au Seigneur, mais quand il en vint à aborder directement le pacte entre Ardents et Engloutis, elle n'y tint plus et se leva, pour mieux canaliser son énergie en faisant les cent pas sur le parquet craquant.
Pendant ce temps, Zackheim ne l'avait pas quitté des yeux, et son regard d'émeraude était particulièrement aiguisé... Dinjelaï fit un nouvel aller-retour, avant de s'immobiliser en face du Seigneur et de lui adresser un sourire qu'elle voulait emprunt de cordialité.
Bigre, Seigneur, vous allez droit au but... Comment se dépêtrer de cet interrogatoire? J'ai toujours trouvé que chez les Célestes, il n'y avait guère de juste milieu entre "salutations distinguées" et "prises de décisions" !
Le décalage de la situation lui apparu brusquement, elle se dérida et ne pu retenir un rire franc.
Comme vous y allez ! Concernant Drazahir, sachez que je considère toujours comme productive la réunion que nous avons eu au Manoir d'Ael Alfirin. Depuis celle-ci, j'ai acté que nous travaillons ensemble pour faire front au Mage. Grâce à Flarmya, nous n'avons pas encore subit d'attaque isolée, et je doute que le Mage ne fasse l'erreur de nous sous-estimer en venant à l'affrontement direct, mais si tel devait être un jour le cas, je vous assure du soutien plein et entier du Màr Luimë, et sachez que j'attends la même chose en retour. Sur ce point donc, nous sommes sur la même longueur d'onde. Concernant l'échange d'informations, je ne suis pas guérisseuse, ni archiviste, mais je vous garanti que sous les Flots, les Engloutis qualifiés travaillent d'arrache pied. Mais peut-être avez-vous raison concernant les messagers, l'idée est à développer je pense...
Mais, si vous le permettez Zackheim... Je pense que ce n'est ni l'heure, ni le lieu. Vous avez raison, nous devons faire front commun. Front commun entre tous les Kaerls de Tol Orëa. Nous sommes tous menacés par le même ennemi. C'est pourquoi je ne prendrais aucune décision en l'absence d'un représentant du Màr Tàràlom.
Un froid glacial souffla dans la pièce. Dinjelaï fit quelques pas en direction de Zackheim, lui offrant un sourire qui contrastait avec la fermeté de sa dernière phrase:
Il ne me semble pas constructif de prendre des bouts de décisions, en privé. Drazahir ne nous voit pas à cet instant, or il doit savoir que nous avançons uni contre lui.
Elle pris une inspiration profonde, et poursuivi, s'avançant sur le terrain glissant de la deuxième remarque du Seigneur Céleste.
Concernant les relations entre Ardents et Engloutis. Sachez simplement que mon objectif est de pacifier des relations qui ont été par le passé extrêmement tendues et très préjudiciables aux Engloutis. Vous pouvez être certain que je partage vos réserves concernant la personnalité d'Alauwyr Iskuvar, mais que depuis que je suis à la tête du Màr Luimë, j'ai pris la décision de ne pas limiter les relations entre les Kaerls aux relations entre leurs dirigeants.
Dinjelaï inspira, elle dévisageait Zackheim, tentant de deviner sur ses traits la réceptivité du Seigneur à ses paroles. S'était-il refermé comme une huitre lorsqu'elle l'avait contrarié? Son visage était de marbre, elle poursuivi comme si de rien n'était...
Aujourd'hui, je souhaitais vous rencontrer, en privé. Non pour discuter de Drazahir, non pour vous exposer en détail la politique diplomatique du Màr Luimë. Je souhaitais vous rencontrer pour vous connaître Seigneur Zackheim. Personne n'ignore que pendant le règne de la Dame Amlug, la seule diplomatie qu'il existait entre nos Màr était l'indifférence. J'oserais ajouter que nombre d'Engloutis ont des griefs contre votre ancienne Dame. Je crois qu'au delà des alliances temporaires face aux menaces communes, nous gagnerions à nous porter réciproquement une attention bienveillante... Qu'en pensez-vous?
Elle portait sur le Seigneur Céleste a cet instant un sourire chargé d'espoir, et un regard confiant. |
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Jeu 25 Avr 2013 - 17:24 |
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Zackheim quitta brusquement les manières assurées et sans cérémonie qu’il avait choisi d’adopter. Cette attitude laissait entendre que ce qu’il avançait, étant placé sous le signe de la froide raison, ne pouvait que rencontrer l’assentiment de l’auditoire. Il savait qu’il exaspérait ainsi *ceux qui, aussi orgueilleux que lui mais qui n’acceptaient pas leur infériorité sociale. Rien à craindre de tel avec la Dame. Il avait été satisfait de sentir une légère inquiétude, non ..., le terme relevait trop du langage de l’émotion, disons plutôt : une ombre de perplexité, chez Dinjelaï qui l’observait sans se départir cependant de son sourire affable. Elle était fort agréable à regarder, longue, fine, comme une de ces biches gracieuses qui surprennent le promeneur, suspendant un instant l’élan de leur fuite pour fixer l’intrus de leurs grands yeux d’ombre liquid. Chez la Dame des Engloutis le regard mauve évoquait un monde féérique tranquille et lumineux. Dinjelaï avait d'ailleurs des pouvoirs magiques. Lordan Ventaren les lui avait commentés au retour de la Quête des Vertueux avec d’autant plus d’enthousiasme qu’il savait ne pas trahir un secret. Zackheim le soupçonnait d’avoir été plus ou moins amoureux, le temps de la quête, de sa "chef de mission", d’autant plus facilement et superficiellement que le coeur sans malice de l’aspirant la jugeait inaccessible. Zackheim comprenait parfaitement l’émoi du jeune chevalier devant cette femme belle et attirante, bien qu’il n’y eût rien de particulièrement masculin dans le plaisir indéniable que lui-même éprouvait en ce moment à la voir évoluer, vive et souple devant lui. Depuis déjà longtemps sa virilité ne s’éveillait plus qu’en la seule présence de Persée et même à sa simple pensée. L’imaginer suffisait à le remplir d’attente, d’espoir impatient, d’un désir si passionné qu’il se sentait pâlir, comme si son absence lui retirait sa vie. Les autres femmes aussi séduisantes fussent-elles, n’étaient plus que de jolies choses à contempler en passant, comme on admire une belle fleur, un charmant paysage. Mais celle-ci présentait d’autres attraits que sa grâce féminine. C’était une dirigeante ferme et avisée, intelligente et dynamique, et il se sentait à l’aise en sa présence, justement parce que ce qui les rassemblait n’avait rien d’ambigu, rien d’émotionnellement sexué. Et pourtant , elle demeurait femme, gracieuse, enjouée, plaisante à voir comme elle allait et venait alors que lui, vissé sur son bord de table jouait l’immobilisme attentiste et prudent.
Elle répondit avec une sorte d’enjouement à son analyse de la situation mais sans se départir de sa franchise et de sa façon directe de s’exprimer. Il remarqua la manière habile dont elle présenta la similitude de leurs préoccupations pour aboutir finalement à l’affirmation nette d’une divergence essentielle en refusant toute alliance bipartite. Pas question d’isoler le Màr Tàràlom . Il en fut un peu irrité car il pensait avoir déjà suffisamment modifié sa ligne de conduite fondamentale en acceptant ce rendez-vous avec la dame du Màr Luimë. Outre sa prudence habituelle et son goût du secret, c’était la prévision des réactions horrifiées de la branche ultra-conservatrice des Galastdens qui l’avait poussé à ne pas rendre publique cette réunion. Déjà, l’Héritier (eh oui, il avait maintenant un Héritier...) lui avait fait un long mémoire objectant à l’assemblée des seigneurs et Dames au Manoir, affirmant que l’Honneur prévalait sur la sécurité, que seuls les Célestes étaient dignes de diriger l’Empire des Dragons, que les Engloutis n’étaient que des opportunistes déloyaux et les Ardents des scélérats sanguinaires. C’est pourquoi il n’apprécia pas l’intransigeance de Dinjelaï en ce qui concernait les Ardents et il se demanda quel piège cachait alors cette réunion à deux. Il nota aussi qu’elle minimisait trop les pouvoirs de Drazahir, non seulement en tant que magicien mais aussi en tant que dirigeant d’un ensemble d’alliés inconnus . Les Vertueux n’avaient été que des marionnettes lancées sur le Rhaëg pour en tester les défenses et la capacité des Kaerls à s’unir contre un danger commun. Les zombies, les marqués, tout indiquaient des potentialités d’armes inédites qui relevaient certainement plus de l’Ancienne Magie que des faibles pouvoirs restés actifs chez les Liés de Tol Orëa et aussi, ponctuellement ici et là sur les autres continents. Des rapports lui en parvenaient, signalant des manifestations surnaturelles qu’il jugeait plus nombreuses depuis la réapparition de Drazahir. Il avait étudié de près les Archives et le doute n’était plus permis. Un monstre multiforme semblait s’éveiller dans les profondeurs de la terre et secouait l’équilibre du monde. Il n’était pas persuadé que la proclamation publique du front uni que les trois kaerls présenteraient à Drazahir fût la stratégie la meilleure. Auprès d’Ehsan, le Mage semblait avoir joué la carte de la division, poussant le vieux Galastden à refuser toutes les tentatives que Heryn avait acceptées pour que les tensions diminuent entre les trois Ordre . Profitant de son prestige encore grand auprès des Maîtres, le Patriarche s’était complu à attiser les haines par des propos belliqueux lors des réunions où il démontrait que les Célestes n’avaient rien à gagner à chercher l’alliance avec les autres kaerls. Il fallait peut-être au contraire laisser croire à Drazahir que ses projets aboutissaient malgré la défection de Zackheim, qu’il avait cru pouvoir dominer comme il l’avait fait pour Ehsan. Certain de son pouvoir, il pouvait devenir imprudent.
Zackheim regarda Dinjelaï sans rien montrer de la course de sa réflexion. Il fallait la laisser le plus longtemps s’avancer, se dévoiler, ce qu’elle faisait avec simplicité et aisance. Etait-ce là le côté retenu et volontiers retors que l’on prêtait aux Engloutis ? Elle admettait les compromis, soit. Lui-même avait appris de l’exercice du pouvoir qu’on ne pouvait gouverner sans louvoyer et pactiser sitôt que l’on sortait des limites où l’on était le maître absolu. Il pouvait imposer sa loi aux incapables et aux ambitieux du Màr Menel . Il ne pouvait que traiter avec les autre dirigeants. Ou alors les combattre et les vaincre. Mais Drazahir était là .
Elle acheva son discours par une idée qui ne l’avait pas même effleuré et qui, après la première surprise lui procura une sensation imprévue d’amusement . La belle Dame souhaitait le connaître ! elle voulait savoir qui était Zackheim de Galastden en dehors de son double rang de Seigneur et de chef de sa Maison. Comme si cette connaissance était transmissible ! Qui pouvait se vanter de se connaître et encore plus de pouvoir transmettre cette connaissance aux autres ? Cette ingénuité ne pouvait être crédible venant d’une Dame connue pour la pertinence de son jugement et son esprit peu enclin à la douceur facile.
Zackheim la fixa un instant., cherchant où était le piège.. En fait, elle voulait une entente durable à titre personnelle et non seulement une alliance dans la guerre contre Drazahir. Autant dire que la Dame profitait de la situation pour glisser une carte étrangère dans le jeu en cours. Elle lui faisait le coup de la confiance, du sourire charmant ! Elle pensait que son kaerl profiterait d’un rapprochement avec les deux autres et savait bien qu’il ne refuserait pas cette entrevue, étant données les circonstances. Alauwyr Iskuvar était déjà considéré par la Dame comme acquis à cette nouvelle conception des rapports entre kaerls. Il lui fallait aussi voir du côté des Célestes. C'était cohérent et somme toute, justifié politiquement.
Zackheim se remua légèrement sur sa table pour montrer qu’il n’était pas préoccupé au point d’en oublier son confort et de se détendre un peu les muscles, puis il risqua un sourire légèrement amusé :
-Me connaître ? Quelle étrange idée de vous adresser à moi ...N’avez-vous pas déjà votre opinion ? En tant que Dame du Màr Luimë, tout ce qui se dit sur moi vous est connu. Mon image négative : un tyran, qui a profité des circonstances pour prendre la place de la Dame Heryn, un homme à mystères, un réactionnaire ambitieux, un sournois de la pire espèce car parfois susceptible de violences aggravées...mon image positive : un loyal serviteur de sa Maison et de son Kaerl, un homme d’études et de savoir qui se consacre à la restauration de la puissance des Célestes, mise à mal par la gestion inconséquente des Dalneÿs. Votre opinion n’est-elle pas déjà faite ?
Il se leva brusquement. Il ne fallait pas que la Dame profite du trouble qu’il sentait le gagner car oui, il avait beau avoir perçu le danger de la ruse qui consistait à faire dévier l’intérêt vers le plan personnel, il sentait bien qu’une part de lui-même était flattée, séduite par cette proposition aimable, ces mots qu’il croyait réservés aux hypocrites formules protocolaires des Chancelleries. Une attention bienveillante !! Entre des chefs d’ états rivaux, qui s’étaient combattus..Cependant....après tout, il la trouvait plutôt attirante et sympathique.. N’était-elle qu’une manipulatrice ou bien croyait-elle sincèrement à une possibilité d’entente politique passant par des liens personnels ? Il eut un petit rire sans ironie. Finalement, que risquait-il ? C’était bien la première fois qu’il trouvait intéressante une dame qui affirmait vouloir le connaître. Il s’inclina en écartant les bras légèrement et en ouvrant les mains dans le geste qui signifie accueil et bienvenue :
-J’ai montré à la réunion quelle était ma position en tant que Seigneur. Je ne suis pas sûr que votre attention devienne bienveillante en me connaissant mieux. Cependant je n’aimerais pas, quant à moi, devoir éprouver à votre égard des sentiments autres que bienveillants. Je crois qu’on appelle cela de la sympathie. Que voulez-vous apprendre de plus sur Zackheim de Galastden, Dinjelaï Al Ysiria que je connais si peu ?
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Invité
Hors ligne
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Posté le:
Sam 27 Avr 2013 - 17:31 |
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Sans se départir de son sourire un brin interrogatif, Dinjelaï tentait de percer les secrets des expressions du Seigneur Céleste. Haussements puis froncement de sourcils: il avait peur de tomber dans un piège. Oscillation de l'assise d'une fesse sur l'autre : il ne voulait pas paraître rigide. Elle avait cru voir un premier temps son visage s'illuminer, et elle avait retenu sa respiration, puis le regard d'émeraude de Zackheim s'était assombri, ses épaules s'étaient légèrement refermée, et alors l'elfe avait cru qu'il allait se lever pour quitter la pièce.
Zackheim était dans une position inconfortable. A la fois dans son propre Kaerl et en dehors de chez lui. Il était normal qu'il craigne de se dévoiler. D'ailleurs qui se confie à une quasi inconnue? Pour autant, les motivations de Dinjelaï étaient sincères. Contrairement au Seigneur obtus à la limite de la stupidité qui dirigeait le Màr Tàralom, elle percevait en Zackheim une ambiguïté qui avait un charme certain. La dualité entre force apparente et faiblesse cachée passionnait l'elfe comme la flamme le papillon. L'envie de percer l'armure de l'homme dépassait la simple motivation politicienne. Contrairement à lui, elle acceptait les facettes de noirceur chez chacun, d'où ses régulières amitiés avec les membres de l'Ordre Ardent. L'ombre mettait en relief la véritable lumière des âmes, et celle de Zackheim lui semblait brûler d'un feu resplendissant. Alors qu'elle tentait de deviner les émotions qui filaient dans son esprit, Din senti un léger picotement au bout de ses doigts. Elle voulait sa réponse, elle s'impatientait, comme lorsqu'elle attendait les résultats de l'Académie. Ou plutôt non. Ce qu'elle ressentait à présent, c'était la sourde angoisse de ne pas trouver de réponse à un billet rédigé avec le coeur.
Heureusement, l'attente ne s'éternisa pas. Zackheim se relâcha, paru avoir écarté une hypothétique menace qui aurait pu se glisser dans la question, et donna sa réponse comme dans un tableau à double entrée. Bien / Pas bien. Din haussa les épaules et son sourire s'accentua alors qu'il se levait et adoptait une posture d'ouverture significative. Elle inspira profondément. Quand il évoqua de la sympathie, les joues de l'elfe rosirent légèrement...
Que voulait-elle savoir qu'elle ne savait pas déjà? Il avait résumé en quelques mots la situation générale. Mais le diable se niche dans les détails...
Je ne promulgue pas de jugement à partir de rumeurs Zackheim de Galastden. Et il y a tant de chose que j'aimerais apprendre de votre bouche... Mais par où commencer? Avant tout, je vous l'ai dit, j'aimerais connaître l'homme. On vous dit secret, mais avez vous une famille, plus proche que le cercle de votre Maison, une femme, des enfants?
Un silence plana dans la pièce. Dinjelaï éclata de nouveau de son rire léger:
Voyez, je suis une grande curieuse Zackheim, il y a de très nombreuses choses que j'aime connaître ! J'aimerais que nous commencions par nous éloigner des choses de la vie publique et politique, mais, si vous me trouvez invasive, je vous prie simplement de me le signifier et de me pardonner.
Une famille... Question anodine. Mais que de conclusions à tirer. Que la réponse soit positive, négative ou inexistante, cela signifierait beaucoup... |
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